Je pensais à celle à qui je pense. Je pensais que si je pensais à celle à qui je pense ce n'était pas tant que j'y pensais, car je ne pensais à rien de spécial en pensant à celle à qui je pensais, sinon plutôt que sa pensée m'accompagnait.
Sa pensée accompagnait ma pensée ou comment en son absence elle pouvait m'être présente et c'est d'une bien étrange et curieuse manière, pareille à celle d'une divinité qui présiderait à notre vie sans la déranger, sans nous déranger dans tout ce qui tient à elle, notre vie.
Nous pouvons encore souffrir la solitude physique, de n'être pas physiquement accompagné dans notre existence physique, mais dans notre existence mentale ou spirituelle il en va tout autrement.
Nous pouvons bien prendre un être de chair et de sang, et on pourrait ainsi expliquer l'origine des dieux comme des déesses, enfin des divinités qui accompagnaient l'homme dit primitif et c'était ici et maintenant quoiqu'on n'eut voulu aussi qu'elle ne nous lâcha jamais.
Mais c'est l'ici et maintenant avant l'au delà, car c'est à l'ici et maintenant que pense l'homme avant de penser à l'au delà, s'il lui arrive encore d'y penser avant que de n'être plus ici et maintenant, car parfois il peut n'en avoir pas même le temps ni même l'esprit.
Aussi je me tromperais moi-même si je disais: "je pense toujours à toi". Peut-on dire que l'on pense toujours à Dieu quand on est croyant. Non, plutôt qu'il accompagnerait toujours nos pensées.
Par la pensée il y a autant une humanisation d'un Dieu, dans le sens qu'on le ramène à nous, c'est à dire à nos pensées, qu'une divinisation d'un être de chair et de sang dès qu'on pense à lui, ou plutôt dès qu'il accompagne nos pensées.
La solitude existentielle ne tient pas tant à l'existence qu'à l'homme qui pense; j'entends pas à l'existence matérielle de l'homme mais à son existence mentale ou spirituelle. Aussi l'animal ne serait jamais seul comme l'homme peut l'être.
L'homme qui aurait toujours besoin non pas tant de penser mais d'être accompagné dans sa pensée. Il y a la muse des poètes, l'inspiration par qui tout créateur ne voudrait pas être lâché. Puis vient la légion des croyants.
A quoi se rattachent alors ceux qui ne croient en rien. Oh, ils ont bien quelqu'un à qui ils pensent comme moi je pensais à celle à qui je pense sans vraiment y penser sinon qu'elle ne quittait pas mes pensées, aussi qu'en mes pensées et grâce à elle je me sentais moins seul.
C'est parce qu'elle y était sans y être, telle une divinité qui ne ferait qu'y présider leur laissant libre cours. Un grand poète espagnol, Antonio Machado, écrit dans son célèbre poème Retrato (le portrait):
"Converso con el hombre que siempre va conmigo/ Quien habla solo espera hablar a Dios un día/ Mi soliloquio es plática con este buen amigo/ que me enseño el secreto de la filantropía."
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire