Les gens se sacrifient mais ce qui les rend malheureux (contrairement à ce qu' ils pensent) ce n'est pas qu'ils se sacrifient mais qu'ils aient perdu le sens de leur sacrifice, les gens vivent mais ce n'est pas de vivre qui les rend malheureux mais de ne pas savoir pourquoi ils vivent, d'avoir perdu le sens de leur vie. Retrouver le sens de sa vie serait retrouver le sens du sacrifice.
Pour cela il ne faudrait pas que cela vienne de l'extérieur, que la société le leur impose, et par la même les en détourne, parce que les croyant incapables de tout sacrifice, parce que voyant en tout sacrifice ce qui les dessert (ou plutôt parce que voyant en tout ce qui les dessert un sacrifice possible à exiger d'eux), et finissant eux-mêmes à voir comme la société voit, c'est-à-dire en tout sacrifice ce qui les dessert, ils pensent ne pas s'y retrouver, et c'est parce qu'ils n'y sont pas quand le propre de l'homme c'est d'être tout entier à ce qu'il est.
Alors seulement on peut parler de sacrifice ou d'être sacrificiel, car c'est être tout entier à ce qu'il est, à son existence absolue et non à l'existence relative qui est son existence en société, qui fait de lui un être sacrificiel. Aussi étant à lui-même il échappe à la société. Maria Zambrano le dit à sa façon quand elle écrit: "El lugar del individuo es la sociedad, pero el lugar de la persona es un intimo espacio. Y en él, si reside un absoluto" que si le lieu de l'individu est la société le lieu de la personne est l'espace intime. Alors en lui réside un absolu".
Mais il n'échappe pas à la société à des fins personnels et égoïstes comme on pourrait l'entendre, mais parce qu'il est celui qui pense la société et non celui qui est pensé par la société, parce qu'il est celui de qui est né la société plus qu'il est né de la société, parce qu'il agit sur la société plus qu'il n'est agit par la société. Au cas contraire ce n'est plus un homme et son existence n'est plus absolue et indépendante mais relative et dépendante.
C'est encore suivre la pensée de Maria Zambrano que de dire que l'homme n'est pas attaché (ou ne doit pas l'être) à sa société comme l'arapède au rocher de sorte que l'on puisse les confondre, qu'il ne puisse faire qu'un; pas bien différent en cela de l'animal dans la nature qui fait corps avec elle au point de ne jamais en sortir. La société n'est pas pour l'homme une seconde nature. Ce que l'on appelle la nature intime de l'homme n'est autre que sa nature, c'est d'elle et non pas de la société que tout ce qui est de l'homme procède.
C'est là qu'il a son existence absolue sans quoi pas de sacrifice qui est aussi un absolu, du relatif ne peut pas procéder l'absolu, de la société le sacrifice de l'homme. Ce n'est par conséquent que par ce par quoi il transcende sa société (plus qu'il ne s'y oppose), et toute l'histoire de l'évolution des sociétés est là pour le dire, que l'existence de l'homme trouve un sens à ses propres yeux qui ne sont pas ceux de la société dans laquelle il vit mais à laquelle il aspire.
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