Quand je dis qu'on a perdu le sens du sacrifice c'est aussi bien dire que ce n'est pas dans le sens où il s'exerce que l'on peut parler de sacrifice. Quand on dit que c'est naturel que les gros poissons mangent les petits on parle bien de la nature humaine et animale, pas de sacrifice. Que les plus faibles soient sacrifiés aux plus forts est l'inverse du sacrifice, le sens du sacrifice est que les plus forts se sacrifient pour les plus faibles.
Aussi ce n'est pas l'homme qui doit être sacrifié à la société mais la société qui doit se sacrifier pour l'homme, car devinez qui des deux est le plus puissant. Aussi elle doit être de tous les déficits si l'homme s'en trouve bénéficiaire.
De même, que le patron se sacrifie plutôt que l'ouvrier soit sacrifié, et c'est le bon père de famille qui ne fait pas ses enfants se tuer à la tâche parce qu'il leur assurerait le gîte et le souper aussi que de mauvais traitements parce qu'ils seraient de mauvais garnements.
Je dis que le capitaine d'industrie comme le capitaine d'infanterie mène ses hommes au combat en en prenant la tête au risque et péril de sa vie parce que le modèle de l'homme c'est l'homme, et parce que s'il y en a un qui doit la perdre le premier c'est bien celui qui n'a pas su les mener à la victoire. On envoie les autres au sacrifice que quand on a perdu le sens du sacrifice.
Aussi a perdu le sens du sacrifice l'artiste comme l'intellectuel, parce qu'ils montent en première ligne dans ce combat pour la recherche du beau et de la vérité, qui se plaindrait d'avoir à y sacrifier toute une vie, et souvent en effet les meilleurs d'entre eux (bien en avance sur tous) ne reçoivent qu'une reconnaissance posthume.
C'est que surtout on ne demande pas un sacrifice mais se donne en sacrifice. Ce serait prétendre être un Dieu que de demander un sacrifice humain. Mais c'est aussi s'élever au-dessus de l'humain dira t-on que de se donner en sacrifice, quand c'est à peine s'élever au-dessus de l'animal ou les gros mangent les petits, donner son sens de l'humain qui est le sens du sacrifice, et non pas pour les dieux, pas plus que pour la société, mais pour les hommes.
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