samedi 8 mai 2021

Le joug

 

Pièce de bois qu’on attache sur la tête des bœufs pour les atteler. Et si tout était fait pour que les hommes vivent ensemble et qu’ils ne le voulaient pas. Vivre ensemble c’est d’abord travailler ensemble : le joug du travail. Tout le monde ne voudrait t-il pas être travailleur indépendant ? Et plus que l’artisan l’artiste reconnu n’est-il pas celui que l’on reconnaît comme affranchi non pas du travail mais du joug d’un travail imposé par d’autres et à réaliser avec d’autres encore avec qui il n’a pas forcément choisi d’être. Il est libre Max. Toutes les institutions sont des institutions du rassemblement : l’école ( on se met en rang) l’armée (rassemblement sous le drapeau) l’église ( sous un même clocher) … et toutes ont ce que l’on appelle un pouvoir coercitif leur permettant au cas où celui-ci ne se fasse pas naturellement (ce à quoi elles prétendent toutes comme aussi qu’il est dans la nature de l’homme de vivre en société) de l’imposer par la force. Il faut un chef. Oui, en effet il faut un chef si l’on veut un rassemblement ; si l’on veut que les hommes vivent ensemble il faut les obliger à vivre ensemble : voilà la vérité. Dans la famille qui passe pour l’institution la mieux reçue, la mieux reçue comme naturelle, il faut un chef, le chef de famille. Et si cette institution bat de l’aile actuellement, c’est parce qu’elle ne se reconnaît plus de chef, et elle ne se reconnaît plus de chef parce que l’on ne voudrait plus davantage vivre sous le joug de la famille. Dire maintenant que les hommes aient librement accepté le joug serait mentir. C’est la nécessité et quand la nécessité ne se fait plus sentir les hommes s’en libère. Il n’y a pas loin qu’il se libère du joug de la famille qui est celui de la cohabitation. Les hommes se libèreront aussi du joug du travail quand il n’y aura plus nécessité à travailler ensemble à la manière des bœufs qu’on attelle. On parle maintenant de rassemblements sauvages quand ils n’ont pas été autorisés ni ne sont très organisés, pas de chef institué, et les craint quand ils ne sont pas fait pour durer, qu’ils sont évanescents, quand on devrait s’interroger si ce n’est pas là la façon la plus naturelle à l’homme de se rassembler, celle qui répond à une nécessité et cesse avec cette nécessité. On voudrait les figer, les cristalliser, les institutionnaliser et que les hommes qui y ont librement consenti se retrouvent pris sous le joug.

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