Certes, mais le problème n’est pas tant d’être aimé de l’autre ou d’aimer l’autre que de
continuer à s’aimer soi-même. Plus que l’amour de l’autre importe l’amour de
soi. Il est celui à ne pas perdre quand souvent c’est l’autre qu’on ne veut pas
perdre, quand l’amour de l’autre ne dépend pas de nous tandis que l’amour de
soi dépend de soi. Le pire serait de perdre l’amour de soi pour gagner l’amour
de l’autre qui n’est par ailleurs jamais gagné, de se retrouver donc sans
l’amour de l’autre tout en ayant perdu l’amour de soi. Et c’est ce qui arrive
trop souvent à ceux qui pensent que "sans amour on est rien du tout". Ils ne se
trompent pas en pensant qu’on ne peut pas vivre sans amour. Ils se trompent en
pensant que cet amour c’est l’amour de l’autre. A l’heure où beaucoup de gens
sont seuls, de gens qui n’ont pas perdu l’amour de soi, mais sont prêts à le
perdre pour gagner l’amour de l’autre qui aux yeux de tous est le seul amour,
le "sans amour on est rien du tout" les pousse au crime, car c’est criminel de sacrifier
l’amour de soi sur l’autel de l’amour de l’autre. Qui dit qu’il vaut mieux que
nous l'autre ? Si encore l'autre c’était Dieu, on peut encore se sacrifier sur l’autel de Dieu,
mais qui pourrait prétendre valoir plus que l’autre au point que l'on sacrifie pour lui cet amour de soi qui est le seul qui donne à sa vie une
valeur, la sienne. A l’heure où beaucoup de gens sont seuls il est donc
criminel de vouloir qu’ils sacrifient sur l’autel de l’amour de l’autre l’amour
de soi en leur fredonnant la chansonnette : "sans amour on est rien du
tout". Et s’ils sont heureux comme ça, faudrait-il qu’ils aient mauvaise
conscience de l’être parce qu’ils ne le doivent pas à l’amour de l’autre mais à
l’amour de soi ?
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