jeudi 6 mars 2025

Le petit blanc


L'oralité et la sagesse des anciens c'est le petit Kanak. Le petit blanc c'est le sauvage aussi que le civilisé. Car il reviendra botté, casqué, armé jusqu'au dent, restaurer la loi et la civilisation blanche qui est celle de son pays. Mais il faut dire quelque chose sur cette loi et cette civilisation blanche, sur sa brutalité et sa violence qui est la manière dont elle s'impose à tous et pas seulement au petit noir mais aussi au petit blanc, et sans doute davantage au petit blanc qu'au petit noir de Nouvelle Calédonie, tout du moins tant qu'il y avait entre lui et la loi la coutume de son pays qui lui était oralement transmise par les anciens.

Je parle du temps ou le Kanak connaissait encore les coutumes Kanak qui lui étaient rapportées par les anciens. Ces coutumes que le petit blanc ignorait et dans sa grande ignorance se moquait. Quand elles tenaient sous leur emprise le petit Kanak comme les lois n'ont jamais tenus le petit blanc. C'est pourquoi je dis que le petit noir avait sur le petit blanc l'avantage de l'oralité et de la sagesse des anciens qui passaient par la coutume, tandis que ni l'oralité (la loi est écrite) ni la sagesse des anciens (dont la loi est totalement dépourvu) ne profitaient au petit blanc.

Il y a cette totale liberté du petit blanc à laquelle s'oppose la loi du petit blanc c'est pourquoi le rapport entre elle et lui qui est aussi le rapport de la loi au sentiment de totale liberté (qui est son sentiment de petit blanc: d'être libre) est d'une grande brutalité qui est aussi celle de sa civilisation à lui même, il lui faut se faire violence pour se montrer civilisé. Ce rapport violent l'est parce qu'il n'est justement pas tempéré par la coutume du petit Kanak, que le petit Kanak depuis son plus jeune âge a intégrée et lui a été donnée par la parole des anciens.

Quand ils sont intervenus bottés, casqués, armés jusqu'au dent, le petit blanc qui avait grandi entre-temps s'était rangé du côté de la loi et des forces de l'ordre de son pays, et le petit Kanak qui avait grandi aussi lui avait dit que les jeunes de Nouvelle Calédonie s'étaient éloignés de la coutume et qu'ils n'écoutaient plus les anciens. Ils n'écouteraient pas davantage la loi des blancs car, s'ils s'étaient éloignés de la coutume, la loi était encore plus éloignée d'eux. 

Seule la coutume aurait pu les en rapprocher, servir d'intermédiaire, d'agent de liaison, rendre cette réalité brutale de la loi et de la civilisation blanche qui s'imposaient à eux moins brutale pour eux. Mais l'écrit avait pris le pas sur l'oralité et la loi sur la coutume. Or ils n'avaient pas plus connaissance que le petit blanc de la loi qui est écrite mais non transmise et ils l'apprendraient à leurs dépens comme lui le petit blanc qui par les coups qu'il avait reçus dans son enfance avait dû apprendre dans la violence et par la violence a reconnaître l'autorité et à qui la loi donne autorité.

C'est pourquoi le petit blanc, ce petit sauvageon, aurait pu dire à son ami d'enfance, le petit Kanak de Nouvelle Calédonie, bienvenue à la civilisation blanche, en espérant cependant qu'il ne lui faudra pas davantage de piqures de rappel, car c'est autant de rappel à la civilisation blanche que de violence déversée sur la Nouvelle Calédonie. Ou encore. 

C'est ainsi que les blancs vivent ou l'apprennent à leurs dépens la vie, c'est-à-dire apprennent à vivre sans coutumes mais avec des lois qu'on dit répressives, c'est-à-dire avec des coups: qu'ils apprennent des coups reçus mais qu'ils apprennent aussi à les porter; aussi c'est ainsi qu'à leur tour ils portent leur civilisation et c'est tout ce qu'on peut dire en matière de transmission de la civilisation blanche. A bon entendeur salut.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire