"Il faut avoir de l'ambition", "Tu manques d'ambition". Qui ne sait pas vu seriner ce mot d'ambition tout au long de sa vie. Qui ne l'a jamais autant exécré que moi. Qui n'a jamais autant que moi vu dans ce mot ambition un manque d'ambition. Car l'ambition ne va pas assez loin. Car l'ambition est mesquine et égoïste. Elle n'entraine que soi sans entraîner pour autant le soi, sans le sacrifier à l'autre. L'ambition c'est la gloire sans le sacrifice. L'ambition est l'ambition bourgeoise, elle est sans générosité, sans cœur, sans âme, proprement inhumaine. Pourtant beaucoup ne comprendrait pas aujourd'hui qu'un humain n'ait pas d'ambition. Mais l'ambition c'est l'humain dévoyé de son humanité. Quand il ne reste à l'humain que son ambition c'est qu'il a tout perdu de son humanité et est tout disposé pour autant à la sacrifier à son ambition plutôt que de se sacrifier pour l'humanité.
L'ambition que tout le monde voudrait motiver, et ici encore la volonté de la société passe pour être la volonté de chacun, ne sert finalement que l'ambition de la société qui est de prospérer au détriment de l'homme à elle finalement sacrifié, quand il ne croit paradoxalement (car il est par elle trompé) que servir ses propres intérêts et sa propre prospérité en y sacrifiant les autres: êtres alors considérés par lui comme veules et sans volonté ne méritant que ce qui leur arrive: et c'est la pauvreté à laquelle il ne peut alors comprendre que la société prête assistance, comme quoi inconsciemment ou pas il se sait appeler par la société, il sait que l'appel de l'ambition est l'appel de la société à toujours plus de prospérité fût-elle au détriment de l'humain. En ce sens on voit bien que cet appel est aussi appel au sacrifice mais pas de soi sinon de l'autre. L'homme ne peut s'en sentir aussi grandit que si on l'appelait à son propre sacrifice et que si c'était son propre sacrifice qu'il acceptait.
Il y a en ce subterfuge un bon côté c'est que l'homme est mieux amené à l'accepter; et un mauvais côté c'est qu'il perd le sens de sa vie qui est sens du sacrifice, car si sa vie n'a de fin qu'en lui-même qu'en est-il de cette fin puisqu'il est de toute façon amené à disparaître: il ne restera pas alors après lui son sacrifice. Et quand la gloire porte le nom et la marque de l'homme (non pas des dieux sinon de l'homme fait dieu (c'est-à-dire immortel) plutôt que de dieu fait homme), l'ambition ne porte le nom et la marque que de son infamie et de son inhumanité: et il s'appelle société. On pourrait presque dire alors qu'il est par conséquent heureux que l'homme soit effacé autant qu'il s'efface vis à vis de la société exigeant de lui d'avoir de l'ambition, mais une ambition servile et aveugle, qui ignore sa fin et en quoi elle sert et à qui elle sert, car il croit par l'ambition tout ramener à lui et pouvoir se déprendre de l'humanité.
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