samedi 11 janvier 2020

La tolérance zéro


Une société sécuritaire qui tend vers la tolérance zéro est une société qui a peur de mourir et se rigidifie, et cette rigidité n’est autre que celle de la mort de cette société. Toute société comme tout organisme vivant est destinée à mourir. Ce serait faire preuve de sagesse que de l’accepter. Ce serait aussi se préparer à une mort plus douce. A la transition ou passage en douceur à une autre société. Pas à la fracture. Pour cela il lui faudrait avoir un peu plus de souplesse. Qu’elle accepte le chômage. Qu’elle accepte le travail au noir. Qu’elle accepte les sans papiers. Dans le meilleur des mondes il n’y aurait pas de chômage. Dans le meilleur des mondes il n’y aurait pas de travail au noir. Dans le meilleur des mondes il n’y aurait pas de sans papiers. Mais voilà, on n’est pas dans le meilleur des mondes mais dans celui des hommes. Elle doit accepter ses insuffisances. Elle doit accepter la perte de ses valeurs. Elle doit accepter qu’elle ne répond plus ni aux besoins de l’homme d’aujourd’hui, ni à sa mentalité qui, si elle n’ose pas encore s’exprimer, et comment oserait-elle face à la montée de l’intolérance, a changée. Quand on ne sait pas où on va mieux vaut ne pas se mettre des œillères. Ce serait ne pas vouloir voir où on va. Que ceux qui font cette société ne rejettent pas ceux qui feront la société de demain s’ils ne veulent pas que ceux-ci à leur tour ne les rejettent et construirent ensemble. Que ceux qui en appellent aux traditions, qui sont comme un lien entre le passé et le futur, qui sont comme une continuation de la civilisation humaine, ne contribuent pas par leur intolérance à leur rejet, à une rupture avec le passé et la tradition. Parce que s’il faut tout repousser tout sera repoussé pour avancer, et autant d’obstacles qu’on opposera à cette avancée autant d’obstacles seront repoussés. C’est la force du vivant. Que celui qui va mourir laisse la place au vivant. Ce serait même sa tâche que de la lui faciliter. Par plus de souplesse. Par plus de tolérance. Mais il faut croire qu’il est autant dans la nature humaine que dans celle de la société que de se rigidifier à l’approche de la mort. C’est pourquoi la tolérance zéro est un signe de mauvais augure non pas pour ceux contre lesquels elle s’exerce mais pour cette société elle-même qui en fait preuve.

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